Réservoirs hydroélectriques : des batteries d’énergie répartissable
09 mai 2022
09 mai 2022
Les réservoirs d’eau des centrales hydroélectriques font partie de la solution pour une croissance soutenue de la production d’énergie renouvelable.
Par Mark Allen et Stanley Hayes
Dans les efforts pour décarboner le secteur de la production d’électricité et effectuer la transition énergétique, les énergies renouvelables jouent un rôle important. Mais d’autres technologies doivent aussi être mises à profit pour fournir de l’énergie sur demande. Alors que la production d’énergie solaire et éolienne augmente et que celle thermique diminue, les rôles et les applications de l’hydroélectricité, une source classique d’énergie, continuent de s’accroître.
Les occasions sont plus nombreuses que jamais d’intégrer l’hydroélectricité à d’autres énergies renouvelables en croissance pour former de grands systèmes énergétiques propres. La croissance soutenue de la production d’énergies renouvelables entraîne une demande pour le stockage énergétique à l’échelle des réseaux. Les réservoirs d’eau des centrales hydroélectriques, qui tiennent lieu de batteries hydrauliques, font aussi partie de la solution.
Voyons en quoi consistent les batteries hydrauliques et comment elles peuvent aider les collectivités à atteindre les objectifs de développement durable.
En tant que consommateurs, nous présumons que les entreprises de services publics maintiennent en permanence sur leur réseau un équilibre entre production et consommation pour assurer notre approvisionnement en électricité. Ces entreprises font face à la difficulté supplémentaire de maintenir la fréquence et la tension sur leur réseau, ce qui se complique quand le soleil se couche ou que le vent tombe. Pourquoi? Parce que la production électrique chute alors brusquement.
Bien que les sources énergétiques solaires et éoliennes fournissent une électricité précieuse, elles ne peuvent en produire de manière continue et la quantité qu’elles génèrent ne peut être contrôlée à l’avance. C’est là qu’interviennent les systèmes de production d’énergie répartissable. Ces systèmes peuvent être mis en fonction sur demande, et la quantité d’électricité qu’ils injectent sur le réseau peut être régulée de manière dynamique en fonction des besoins.
Certaines sources d’énergie répartissable – stockage par pompage, biomasse et géothermique – ont été largement adoptées dans le secteur de l’électricité. Mais une technologie existante a peut-être été négligée : l’hydroélectricité.
Les collectivités se tournant vers les sources d’énergie durables, l’hydroélectricité est une source classique, stable et complémentaire dans la vision du développement d’énergies propres intégrées.
Les centrales hydroélectriques classiques sont de loin les plus grandes productrices d’énergie renouvelable dans le monde. Elles font l’objet de développement et de perfectionnement depuis plus longtemps que les technologies éoliennes, solaires et de stockage sur batterie. Elles présentent aussi un avantage fort intéressant : leurs réservoirs peuvent servir à stocker l’énergie nécessaire pour contrer le problème de la production intermittente des sources renouvelables dépendantes des conditions météorologiques.
Le concept d’une batterie hydraulique est simple : un répartiteur obtient le contrôle de la production en vertu d’un contrat d’achat d’électricité pour pouvoir faire du stockage d’énergie sous forme d’eau dans le réservoir de la centrale. Quand le répartiteur veut stocker de l’énergie, il réduit la production d’électricité et l’eau s’accumule dans le réservoir plutôt que d’être turbinée. Lorsque le répartiteur doit répondre à une demande accrue ou maintenir la fréquence et la tension, il augmente la production pour injecter de l’électricité dans le réseau.
Une batterie hydraulique peut être utilisée en combinaison avec des installations flottantes de production d’énergie solaire afin de créer un système hybride. Cette combinaison de technologies prend de l’essor aux États-Unis, alors qu’elle est plus fréquemment utilisée ailleurs dans le monde, quand l’espace pour installer des parcs éoliens terrestres est plus rare.
Non seulement un réservoir d’eau offre un espace facilement disponible, mais les panneaux solaires flottants et le barrage hydraulique se complètent bien. L’utilisation de panneaux solaires flottants peut contribuer à réduire l’évaporation de l’eau du réservoir, ce qui accroît la quantité d’énergie stockée disponible dans le réservoir.
Les batteries ont l’avantage de répondre très rapidement aux besoins d’un réseau, mais elles peuvent être coûteuses pour les entreprises de services publics. Comment faire pour réduire les coûts et améliorer l’efficacité de ces batteries?
Nous suggérons l’approche DIGS (Dispatchable Integrated Generation System – système de production intégrée et répartissable) qui s’appuie sur la batterie hydraulique et allie l’hydroélectricité, l’énergie solaire et une batterie tampon, le tout pouvant être contrôlé de manière coordonnée. En combinant une batterie hydraulique avec un dispositif de stockage sur batterie d’envergure nettement moindre que le réservoir, on obtient un système capable de fournir rapidement de l’électricité, même en cas de réserve réduite.
Les entreprises de services publics investissent dans l’énergie solaire en plus d’augmenter leurs investissements dans des batteries munies de systèmes de commandes et de logiciels complexes pour le stockage d’énergie à l’échelle de leur réseau. Le coût de telles batteries est en baisse, mais selon les prévisions, il devrait demeurer dans une fourchette de 200 à 400 $ par mégawattheure (MWh) de stockage pour les dix à vingt prochaines années. Le coût devrait ensuite fortement diminuer selon le site.
Notre approche procure à moindre coût une solution de stockage d’énergie à court et à long terme, sans devoir recourir à des installations de stockage sur batteries à l’échelle d’un réseau. La batterie utilisée dans une approche DIGS étant plus petite, cela atténue les risques liés à la chaîne d’approvisionnement et à l’imprévisibilité des prix des composants de batteries comme le lithium et le nickel – c’est un avantage important dans un contexte de marché empreint d’incertitude.
Contrairement à un système de stockage reposant uniquement sur des batteries, lequel perd 15 % ou plus de son énergie en raison des effets thermiques, une approche DIGS fournit un moyen de stocker l’énergie sans perte liée à ce stockage. Aussi, cette approche augmente l’énergie totale disponible en raison de sa composante solaire – une situation en tout point gagnante!
Selon les données de l’agence américaine pour l’information sur l’énergie (EIA) et en posant l’hypothèse qu’environ 25 % de la capacité hydroélectrique existante peut être utilisée en tant que batterie hydraulique, notre analyse montre que presque tous les États possèdent des installations hydroélectriques assez importantes pour mettre en œuvre cette approche.
Alors que les collectivités se tournent vers les sources d’énergie durables, l’hydroélectricité offre une source classique, stable et complémentaire dans la vision du développement d’énergies propres intégrées. Une telle vision nécessite que les collectivités investissent dans toutes les options possibles pour réussir, y compris dans les systèmes de production intégrée et répartissable basés sur les batteries hydrauliques.
Traduction du blogue publié originalement sur le site Ideas de Stantec.
À propos des auteurs :
Vice-président, Énergie et barrages, Mark Allen concentre ses efforts dans le domaine des énergies renouvelables, principalement le développement de l’énergie hydroélectrique. Qu’il s’agisse de gérer des projets au pays ou ailleurs, ou de renforcer les relations avec les clients, Mark contribue à bâtir un monde meilleur.
Ingénieur mécanique possédant plus de 40 ans d’expérience, Stanley Hayes est un chargé de projet chevronné dans les projets de conception et de réfection d’installations énergétiques et de barrages, et de tous leurs composants mécaniques.